La question de l’utilité de la validation systématique des rapports des CPIP a été soulevée lors des travaux sur la priorisation des tâches. Au-delà du constat fait par certains d’une perte de temps qui justifiait sa remise en cause, il nous a semblé intéressant de pousser plus loin la réflexion. En effet, avec l’extension de l’utilisation d’APPI s’est mise en place une pratique de soumission systématique de l’ensemble des rapports à la hiérarchie pour validation avant transmission. Cette pratique, qui connaît d’ailleurs quelques aménagements dans la réalité, n’a que trop peu été discutée. C’est pourquoi nous avons mené, au sein du syndicat CGT SPIP 94, un travail qui nous conduit aujourd’hui à proposer la mise en place d’une expérimentation sur la validation en opportunité des rapports sur APPI.
Pour éviter les malentendus, il faut redire que le débat n’est pas pour ou contre la validation des rapports, mais pour la validation systématique ou pour la validation en opportunité.
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LA VALIDATION SYSTEMATIQUE : INTERET, LIMITES, INCONVENIENTS
Pour justifier la validation systématique, les arguments suivants sont avancés. Ils représentent les différents intérêts exprimés de cette pratique :
1°) Responsabilité : être « couvert » en cas de problème sur un dossier, « Ce n’est pas toi qu’on viendra chercher ».
2°) Contrôle de qualité: il s’agit de la validation de la proposition du CPIP par le service donc de la validation de la proposition de prise en charge. Cela devient un positionnement de service et prend donc un caractère collectif.
3°) Dialogue : cela permet un échange avec le cadre, d’avoir un soutien technique,
4°) Surplomb des relations JAP / CPIP : les réponses des JAP sont transmises au cadre qui a validé le rapport, ce qui permet au cadre de lire les échanges.
5°) Évaluation hiérarchique :cela permet au cadre d’avoir un visu sur l’activité de l’agent et celle du service (charge de travail, qualité du travail, effectivité du travail,…).
Portant, dans la réalité de nombreuses réserves sont à apporter à ces attentes :
1°) la validation ne « couvre » pas le CPIP. Cela ne lui évite pas d’être convoqué devant la police, l’inspection… La validation ne produit pas d’effet protecteur. Pire, ça peut constituer un leurre.
2°) et 3°) Il nous semble que le caractère systématique de la validation engendre une massification qui annule les effets recherchés. C’est particulièrement vrai concernant le contrôle qualité et le dialogue. Comment attendre une attention suffisante du cadre quand un rapport important est noyé dans la masse ? Le flux impose d’aller vite. De plus, il n’y a aucune hiérarchie dans les soumissions, rien qui permet d’identifier a priori un rapport « à enjeu » d’un rapport secondaire.
4°) et 5°) concernant le visu de la hiérarchie sur nos activités ou sur les réponses des JAP, il nous semble que, s’il s’agit là de la manière principale de communiquer avec la hiérarchie, c’est qu’il y a un souci…. Cela peut nous permettre d’interroger l’encadrement sur une meilleure communication.
A l’inverse, de nombreux inconvénients de la validation systématique sont identifiés :
1°) Perte de temps pour les CPIP et les ASS : il existe des différences entre le MO, le MF et selon le contexte. Quand une validation est urgente, il faut courir après un cadre (ce qui suppose de le trouver rapidement) simplement pour qu’il clique.
2°) Pour le CPIP : Impossibilité de bénéficier de la garantie d’une attention soutenue du cadre. Et pour l’encadrement : impossibilité d’avoir une lecture attentive, une attention suffisante sur tous les rapports.
3°) Positionnement déséquilibré vis-à-vis du JAP. Le CPIP doit passer par l’aval d’un tiers pour adresser un écrit au JAP. Entre le public, le DIP, le CPIP et le JAP, c’est la seule interaction administrative qui ne bénéficie pas d’un parallélisme des formes (cf schéma sur le pdf).
Dès lors, pourquoi ne pas mettre en place une organisation qui permette au CPIP, de soumettre, quand cela s’avère opportun, le rapport avant transmission ?
LA VALIDATION EN OPPORTUNITE : INTERÊT, RISQUES
Liste des avantages attendus de la validation en opportunité :
1°) Gagner du temps (éviter de courir après un cadre pour qu’il valide)
2°) Gagner en qualité de dialogue avec la hiérarchie : « si je te soumets ce rapport, c’est que j’attends de ta part une attention particulière et une validation en connaissance de mon analyse et éventuellement une contribution à la réflexion ».
3°) Gagner en autonomie : le CPIP connaît la situation. Il évalue l’utilité ou pas de la soumission d’un rapport à son cadre. C’est donc lui attribuer cette…
4°)… compétence d’analyse et de décision. C’est une reconnaissance professionnelle.
5°) Repositionner le CPIP vis-à-vis du JAP. Il transmet directement son écrit, sans aval de sa hiérarchie, dans une relation moins déséquilibrée.
6°) Ouvrir une des conditions d’accès à la catégorie A, qui suppose statutairement un plus haut niveau d’autonomie.
Craintes quant aux conséquences de la validation en opportunité :
On a vu que la validation systématique avait des avantages secondaire inattendus et plus ou moins effectifs. Il faut donc anticiper sur les conséquences d’un abandon du systématisme quant à ces avantages supposés :
1°) « Les CPIP vont transmettre n’importe quoi » : La validation en opportunité n’exclut pas le contrôle de l’encadrement. C’est sa responsabilité de s’enquérir de la qualité globale ou particulière des écrits, de la nature des prises en charges, en en parlant directement avec le CPIP et en consultant tous les dossiers qu’il souhaite.
2°) « Les cadres ne vont plus savoir ce qu’on fait » : Les rapports ne représentent qu’une partie de notre activité. Les cadres y auront accès quoiqu’il arrive. Il ne serait d’ailleurs sans doute pas inutile que l’encadrement bénéficie d’une méthodologie propre à ce sujet.
3°) On va être exposé vis-à-vis du JAP : En fait la relation doit être rééquilibrée, vu que la modification intervient à une seul niveau, dans le sens de la transmission CPIP – JAP, autorisant un rapport direct. Quoiqu’il arrive, c’est toujours au cadre d’intervenir si nécessaire dans le lien JAP / CPIP.
ENFIN, il peut être rassurant de rappeler qu’un CPIP qui souhaite faire valider systématiquement tous ses rapports pourra encore le faire s’il le souhaite.
CONCLUSION
En conclusion, nous estimons que, sans validation systématique, les CPIP peuvent gagner non seulement du temps mais aussi de l’autonomie. En effet, cela leur reconnaît une compétence particulière, ce qui suppose une certaine confiance sur leur capacité de jugement et d’évaluation.
Parallèlement, il faudrait engager une réflexion sur une meilleure communication sur le contenu global des suivis avec non seulement l’encadrement mais également les JAP.
La validation en opportunité peut également être un point d’appui sur une future accession à la catégorie A.
Cela nous semble enfin participer à un meilleur équilibre des relations professionnelles, entre CPIP, DPIP et JAP.
C’est pourquoi nous faisons une proposition d’expérimentation sur le SPIP 94, que nous souhaitons voir adoptée en comité technique après toutes les discussions nécessaires.