http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2021/02/fev-21-politique-de-transfert-V3.pdf
Fin 2020, la DAP a diffusé une note pour augmenter le nombre de transferts entre les MA et les CD. Cette politique sert la lutte contre la surpopulation pénale dans les maisons d’arrêt ; en permettant un transfert de personnes condamnées à des courtes peines vers les établissements pour peines. Ce choix uniquement dicté par le taux d’occupation fait désormais peser sur l’ensemble des établissements, hors maisons centrales, la gestion purement pénitentiaire de flux des personnes détenues, au mépris de toutes les règles et de l’intervention du SPIP.
=> Quand la crise sanitaire a bon dos : à l’origine, la crise sanitaire a permis de reprendre cette vieille velléité d’augmenter les transferts en établissements pour peines de personnes qui relèvent d’une incarcération en maison d’arrêt. Le ministère de la justice, incapable de limiter le nombre d’incarcérations en pleine période de crise sanitaire mondiale a vu dans l’industrialisation des transferts un moyen de freiner autant que possible l’augmentation du nombre de détenus en maison d’arrêt.
=> Des maisons d’arrêt en surchauffe et les paradoxes des dossiers d’orientation : depuis la fin de l’année, les SPIP de milieu fermés connaissent une accélération des transferts des personnes détenues en maison d’arrêt vers les centres de détention, dans leur région ou hors DI via les droits de tirage avec un seul mot d’ordre : faire vite et remplir. Une trentaine de maisons d’arrêts sont concernées en priorité par cette politique de désencombrement. La DAP n’étant pas à une contradiction prêt, prévoit dans sa note que le « SPIP doit signaler dans ses avis toutes situations susceptibles de faire obstacle au transfert et se prononcer sur les facteurs de risque et de protection du détenu ». Quelle hypocrisie ! Exit le maintien des liens familiaux et les projets de réinsertion. Certains chefs d’établissements l’ont tellement intégré qu’ils préconisent d’ailleurs de ne pas engager de démarches et font instruire la demande d’orientation dès le parcours arrivant.
Quiconque a un peu d’ancienneté dans cette administration se souviendra des batailles du SPIP pour éviter le transfert des personnes qui avaient déposé une requête en aménagement : c’est un nouveau bond en arrière que connaissent les SPIP au sein de la DAP, au détriment toujours plus grandissant de la (ré)insertion.
=> Désorganisation des établissements pour peines et des objectifs de réinsertion : cette pérennisation de la pratique des affectations en CD pour des personnes ayant des reliquats courts va bouleverser les prises en charge dans les centres de détention qui ne sont pas dimensionnés pour accueillir ce type de peines : temps d’attente longs pour tout : accès au travail ou à l’école, RDV de soins, passage en débats contradictoires etc. Les quartiers arrivants, et leurs procédures, ne sont pas non plus prévus pour un tel flux de personnes. Enfin, plus les transferts sont massifs, moins ils sont bien préparés : le public verra ses projets arrêtés nets, des rupture de soins, ce qui générera encore plus de colère et de frustration, et cela va complexifier les accompagnements par les SPIP qui doivent déjà répondre à l’anxiété de nombreuses familles.
Sans compter la mise à mal du lien partenarial dans une période déjà compliquée, puisque les partenaires du lieu de départ auront été sollicités en vain, quand ceux sur l’établissement d’arrivée ne seront pas toujours les plus judicieux à mobiliser. Ces flux permanents fragilisent donc le maintien des liens comme les conditions de sortie des détenus à l’encontre de la philosophie de la loi pénitentiaire de 2009 qui instaurait l’obligation pour les « autorités de faciliter l’accès au droit et dispositifs de droit commun des personnes détenues de nature à favoriser leur insertion ou réinsertion ».
Face aux incarcérations toujours trop nombreuses, aux aménagements de peine ab initio qui ont peu cours et aux sorties sous LSC ou aménagements de peine qui sont peu prononcées, la DAP s’adapte en transformant l’ensemble de ses établissements en maisons d’arrêt dans une pure logique de gestion des flux et d’occupation des « places disponibles ».
L’administration pénitentiaire et les publics confiés payent ainsi le fiasco -prévisible- de la LPJ et les SPIP sont de nouveau sommés de s’inscrire dans cette logique, aux antipodes de leurs missions et du sens de leur intervention.