La Sous Direction IP de la DAP : toujours plus loin de vous !

trahison

En ce début d’année, dans un sursaut de transparence affichée, la SDIP (Sous Direction de l’Insertion et de la Probation) de la DAP, département en charge de la politique des SPIP, a présenté les perspectives de son bureau « parcours des peines » pour 2023.

Et le moins que l’on puisse dire c’est que la DAP, via cette sous Direction, ne chôme pas et redouble de créativité pour tenir coûte que coûte le cap pris du tout-évaluation, de l’actuariel et d’une place grandissante du secteur associatif dans le champ d’intervention des SPIP.

Faisant fi des sujets pourtant prioritaires pour les services et les personnels portés inlassablement d’instance en instance par la CGT IP, la DAP continue de dérouler des orientations hors-sol aux conséquences délétères tant pour le service public que pour la défense des missions statutaires et régaliennes du SPIP dont découlent les modalités d’interventions des professionnel.les qui les composent.

A l’instar des programmes de prise en charge collective imposés au forceps et qui font peu de cas des besoins réels de nos publics, la DAP applique la même méthode avec la politique qu’elle entend mener dans les services : des expérimentations qui, à coup sûr, feront l’objet d’une généralisation sous peu et dont elle définit seule le bien-fondé, les objectifs, le contenu, le périmètre, la méthodologie, la temporalité ou encore les contours.

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La CGT IP ne peut se satisfaire une fois de plus d’une simple présentation, quand tout semble déjà ficelé, et qui ne recueille aucune adhésion des OS représentatives des personnels, à commencer par la CGT IP qui s’y oppose même fermement . Nous ne cesserons de le marteler : les organisations syndicales représentatives doivent être associées et réellement concertées en amont de la définition des politiques ou des expérimentations à mener.

De la même manière, nous rappelons que la présentation en instance, soumise au vote, n’est pas optionnelle !

Mais de quels projets/quelles expérimentations parle-t-on au juste ?

  • La création d’un processus de labellisation d’actions menées par l’associatif

L’expérimentation, qui débutera d’ici peu dans 18 SPIP et pour une durée d’1 an, vise à « confier », c’est à dire externaliser pour ne pas dire déléguer, sous le pilotage du SPIP, à des structures associatives privées l’organisation des peines de stage mais également d’actions collectives relative à l’insertion sociale des publics qui ne relèveraient pas du champ d’expertise du SPIP Il est notamment question de la parentalité, de l’accès aux droits ou encore de la citoyenneté … Cherchez l’erreurPour la CGT IP, l’intervention du SPIP est indissociable d’un accompagnement global centré sur l’insertion de nos publics. La DAP ferait bien de relire le décret statutaire des CPIP et la circulaire sur les missions du SPIP : ne leur en déplaise, l’insertion sociale est non seulement de leur compétence mais plus encore leur mission essentielle avec le contrôle du respect des obligations ! La CGT IP s’oppose donc et s’opposera toujours à toute velléité de morcellement et/ou privatisation de l’action du SPIP, notamment à travers le champ de l’insertion.

Ne reculant devant aucune outrance, la DAP avait initialement prévu d’intituler cette expérimentation « label qualité probation », ne cachant même plus sa volonté d’ouvrir toujours plus la porte à de nouvelles délégations sur un champ d’intervention bien plus large et qui pourtant, devrait non seulement n’être dévolu qu’aux SPIP, mais devrait être farouchement défendu au moins par sa propre administration. Ce n’est que par l’opposition des OS, la CGT IP en tête, que toute référence à la probation a été supprimée.

De plus, sous couvert encore et toujours de renforcer l’offre d’actions collectives qui seules trouvent grâce aux yeux de l’administration a contrario de l’accompagnement individuel pourtant aussi indispensable qu’élémentaire et replacer le SPIP en maître d’œuvre d’actions qui lui échapperaient au profit de conventions juridictions/associatif, la DAP ne fait en réalité qu’institutionnaliser la délégation d’une partie des missions des SPIP à un secteur associatif privé en embuscade. En ouvrant une enveloppe financière dédiée à cette délégation, la DAP met les pieds dans le plat de la privatisation !

Avec une volonté affichée de nourrir, par cette expérimentation, la réflexion sur la création d’un secteur associatif habilité, la DAP fait ouvertement le choix de se dégager des arbitrages faits par le garde des Sceaux dans le cadre des États Généraux de la Justice. Car comme nous l’avons rappelé à la DAP (rappel qui a d’ailleurs conduit au retrait de toutes mentions aux EGJ qui auraient donné une assise mensongère à cette expérimentation), ni le comité des EGJ ni le Ministre n’ont retenu la proposition de création d’un secteur associatif habilité auquel serait confié l’accompagnement social des publics !

  • Évaluation et outils actuariels :

Partant du postulat que les services et les professionnels sont demandeur.ses d’outils d’évaluation, notamment de cotation qui se substitueraient à l’évaluation des professionnel.les, le tout en se basant sur la pâle expérimentation PREVA (dont les conclusions étaient pourtant discutables sur bien des points et dont le bénéficie de l’usage de ces outils a été remis en cause par les concepteurs eux même, SPIP / RECHERCHE-ACTION OUTILS D’EVALUATION PREVA VOUS AVEZ DIT SCIENTIFIQUE ? – CGT insertion probation (cgtspip.org), la DAP poursuit sa politique aussi destructrice qu’hors-sol et passe à la vitesse supérieure. Il n’est plus question de laisser faire les services qui se saisissent de certains outils ou d’en introduire insidieusement dans d’autres expérimentations (utilisation de l’outil ODARA dans le cadre du contrôle judiciaire avec placement judiciaire- CJPP) mais bel et bien d’introduire de manière officielle dans les pratiques l’usage d’outils de cotation du « risque ». Ainsi la DAP se fixe pour objectif de développer un outil unique de cotation propre à la probation française pour un déploiement dans tous les services à l’horizon 2026/2027. Notre organisation syndicale dénonce la remise en cause des compétences et la formation des personnels qui œuvrent en SPIP et qui, quotidiennement, par leurs savoir faire, parviennent à nouer des liens de confiance et à faire évoluer positivement les personnes dont le suivi leur est confié.

La CGT IP n’a jamais caché son opposition à l’usage contraint et standardisé d’outils d’évaluation actuariels (Journal les risques de l’évaluation ). La légitimité de l’intervention des SPIP ne découle pas de l’utilisation imposée d’outils pseudo-scientifiques mais bien de l’expertise de ses professionnel.les  « en matière de décisions de justice et d’accompagnement socio-éducatif, de leurs connaissances en criminologie et de l’impact de leurs actions sur l’exercice des libertés individuelles des personnes qui leur sont confiés ».

La CGT IP n’a d’ailleurs de cesse de rappeler à la S-DIP qui aime à les citer sans les connaitre pour appuyer ses orientations, la REP n° 71, référence en la matière : « Lorsque les systèmes nationaux ont recours à des instruments d’appréciation (= outils d’évaluation), le personnel doit être formé à comprendre la valeur potentielle et la limite de tels instruments, et à les utiliser pour étayer son appréciation professionnelle »(non pas pour la fonder)

La CGT IP a donc réfuté, appuyée par les autres OS à l’exception du SNEPAP qui continue d’affirmer quant à lui que les CPIP ont besoin d’outils pour savoir travailler, l’idée de tout besoin avéré chez les professionnel.les d’une intervention autour du seul prisme de l’évaluation du risque de récidive, de la dangerosité ou d’utilisation obligatoire pour tout suivi d’un quelconque outil.

Si la DAP devait se saisir des besoins des services et de ses agent.es, elle devrait davantage s’interroger sur leurs conditions de travail et les moyens qui leurs sont attribués (charge de travail, multiplication des tâches indues, développement du réseau partenarial, recrutement de titulaires, locaux décents ou encore respect des missions statutaires)

Déterminée à dérouler son projet, la DAP fait la sourde oreille. Et pour que la mayonnaise actuarielle prenne, la stratégie sera progressive !

  • La diffusion du guide de l’évaluation en 2023

Expérimenté en catimini par la DAP dans une dizaine de SPIP en 2018, ce guide de l’évaluation, jamais validé ni même présenté devant quelque instance que ce soit, se présente comme une grille d’évaluation (alléluia non scorée) d’une vingtaine de pages, centrée sur la seule notion de risque, qui de l’aveu même de la DAP, vise à « inscrire la personne dans un groupe type présentant le même risque de récidive ».

Malgré les critiques négatives des professionnel.les l’ayant utilisé (trop complexe, trop chronophage, inadapté, …), la DAP fait le choix de généraliser l’usage de ce guide. Mais rassurons nous ; des améliorations unilatérales, telles un pansement sur une jambe de bois, vont être apportées !

Quant à la notion même de risque de récidive, elle est désormais tordue et retournée jusqu’à être appliquée à des personnes non-condamnées dans les outils utilisés pour les auteurs présumés de violences conjugales et intra-familiales, comme le démontre une autre expérimentation en cours : le Contrôle Judiciaire avec Placement Probatoire.

L’adaptation (2023) et l’ usage provisoire du LSCMI (2024-2025) :

Ayant reçu les faveurs de la DAP depuis PREVA, le LSCMI est proclamé par l’administration comme l’outil magique qui le sera encore plus selon elle après quelques adaptations , qu’elle effectuera elle-même et sans avis des professionnels bien entendu. Cette utilisation du LSCMI ne sera que provisoire puisque, accrochez vous bien, une fois son propre outil finalisé (à son goût), celui-ci aura vocation à se substituer au LSCMI. Logique non ? Quand on veut acculturer les services, tout est permis.

Il suffit pourtant de relire le résultat de la recherche action PREVA, réalisée à grand frais au nom de notre administration pour mesurer les limites de cet outil dans la pratique réelle des agents ! Cet acharnement à promouvoir cet outil n’est rien d’autre qu’une soumission insensée au dogme de la psychocriminologie !

Si l’administration évoque une utilisation a priori circonscrite à une sorte d’expérimentation (la DAP n’est pas avare en la matière), les contours restent extrêmement flous : Combien de services seront concernés ? Lesquels ? Quand ? Comment ?

Il en va de même concernant le caractère contraignant ou non de cette expérimentation. Car si la DAP se défend de vouloir l’imposer (quoi qu’il en coûte…) et assure que la formation des agents se fera sur le principe du volontariat, elle n’offre aucune garantie qu’une fois formé.es, injonction ne soit pas faite aux agent.es d’utiliser systématiquement le LSCMI. Pour le constater sur les terrains, nous ne savons que trop bien comment œuvre la DAP et comment sous couvert d’expérimentation, le résultat même mitigé ou négatif est éludé et la généralisation imposée…

La CGT IP s’oppose donc formellement à toute obligation qui serait faite aux agents de se former ou d’utiliser le LSCMI et de se voir imposer la généralisation de son usage.

en parallèle, à compter de 2023 la DAP s’emploiera à développer un outil d’évaluation avec cotation propre au SPIP pour le déployer dans les services en 2026/2027

Affirmant sa volonté d’associer professionnel.les et expert.es (de quoi ? De qui ? Personne ne le sait encore), la DAP entend développer un outil, qu’elle seule considérera adapté et qui serait « plus une aide qu’une contrainte pour les personnels » . Mais nul besoin de trop creuser pour constater que la faculté de son utilisation laissera place à l’obligation car cet outil sera intégré dans l’applicatif informatique, doctrine d’utilisation

De quelle aide parle-t-on au juste ? Pour la CGT IP, le développement de ce type d’outil est une défiance à l’égard du professionnalisme des agent.es, de leur méthodes d’intervention ou la valeur de leur jugement professionnel structuré. Si l’outil n’a vocation qu’à confirmer le jugement du professionnel, quelle en est la plus-value ? Il s’agit d’un pas de plus vers ce que nous dénoncions lors des discussions sur le RPO 1 : l’objectif visé reste d’avoir des outils permettant de résumer l’analyse du SPIP aux seuls critères liés au risque de récidive, et ainsi d’aboutir à une analyse rapide, standardisée, reproductible, et appauvrie des publics. L’objectif de cette soit-disant évaluation sera ensuite l’orientation vers un dispositif pré formaté de prise en charge, assuré par le privé. A terme, se posera nécessairement la question ; si un ordinateur peut le faire, à quoi servent les SPIP ?

La CGT IP refuse cet appauvrissement de nos métiers. Nous refusons d’être résumés à ces évaluateurs/orientateurs au rabais que veut nous vendre la DAP ! La complexité de nos métiers et de nos missions sont bien plus grandes que ça.

La CGT IP le réaffirme : les professionnel.les des SPIP savent « déjà » évaluer, accompagner les publics qui leur sont confiés. Nous ne laisserons jamais dire et laisser croire le contraire !

l’identité et la qualité de la probation à la française comme elle aime à la nommer tout en la dénaturant.

Les personnels des SPIP ne cessent de rappeler leur attachement au service public et au sens de leur intervention dès lors qu’elle s’inscrit dans un accompagnement global, individualisé et fondé sur une prise en charge socio-éducative

De la même manière, les personnels n’ont de cesse de démontrer leur professionnalisme, leur sens du service public, leur dévouement et leurs compétences. La DAP, qui ne cesse quant à elle de leur opposer son mépris, prend, au travers de ces différents projets, le contre-pied de ce qu’est l’identité et la qualité de la probation à la française comme elle aime à la nommer tout en la dénaturant.

Pire en prétendant défendre les SPIP, elle scie en réalité la branche sur laquelle repose toute la probation française, dans sa richesse et sa complexité, au profit d’une probation inspirée d’une vision rétrécie du modèle anglo-saxon. En détournant le regard des vrais difficultés et des vrais besoins des services, elle nous condamne à l’échec. Nos détracteurs et les futurs entrepreneurs de la peine n’en attendent pas moins pour se partager le gâteau !

La CGT IP le dénonce fermement: par ses projets la DAP s’inscrit dans une politique de privatisation des SPIP, dans le dévoiement et délitement de ses missions et contribue indéniablement à la perte de sens du métier ressentie par un nombre croissant de professionnels !

La CGT IP continuera à défendre coûte que coûte et par tous les moyens les valeurs et les missions du SPIP tel qu’elle l’a toujours fait.

La CGT IP invite les agents à prendre aux mots la DAP qui assure que les expérimentations reposent sur le volontariat, et à refuser de prendre part à ces expérimentations hors-sol.