Dérive bureaucratique au Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation des Hauts de Seine

http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2021/03/tract-intersyndical-mars-2021-derive-bureaucratique-au-SPIP92.pdf


Après plusieurs mois durant lesquels nous avons tenté d’instaurer un dialogue social constructif auprès de notre direction, force est de constater qu’aucun de nos questionnements n’a trouvé de réponse. Au mieux la direction convoque les représentants du personnel pour les informer des
décisions prises et demande à ce qu’ils en soient les relais auprès de l’équipe.
Deux assemblées générales réunies à la demande des agents du service ont permis l’expression du lourd malaise qui pèse sur le SPIP des Hauts de Seine :
* Une nouvelle doctrine managériale se met en place ; cinq demandes d’explication se sont abattues sur le service en deux mois et on sait que la « Demande d’Explication » peut constituer l’amorce d’une procédure disciplinaire. Deux Personnes suivies par le SPIP sont suspectées d’avoir commis de graves récidives, des rapports n’ont pas été rédigés dans les délais impartis ; Demande d’Explication ! Et voilà deux CPIP et leur cadre désormais placés dans l’attente anxiogène d’une
possible sanction disciplinaire.


Nous dénonçons comme un signe de la dérive bureaucratique ambiante l’importance désormais cruciale qui est réservée à la production de rapports périodiques en tout genre.


Une collègue a eu l’audace de faire remarquer à la direction ses carences dans la gestion des permanences du SPIP ; Demande d’Explication ! ce qui permet à la direction de ne surtout pas s’interroger sur le moyen d’améliorer l’organisation des permanences, bien que le problème soit
soulevé à chaque réunion de secteur.
Lors de ces réunions de secteur, censées être des espaces de parole et de réflexion collectives, les cadres de secteur sont réduits au rôle de scribes qui doivent faire remonter au « siège » les remarques des agents. Celles qui interrogent le travail de la direction ne sont pas prises en compte et à ce jour aucun retour n’a été fait par l’équipe de direction sur les dernières questions posées.


Face à la surcharge de travail, et malgré le passage en catégorie A de la fonction de CPIP, nous nous retrouvons cantonnés à des tâches d’exécution où toute expression d’une pensée différente de la ligne déterminée par la direction s’apparente à de la déloyauté institutionnelle. Tout ce qui touche au coeur du métier ; les relations avec les magistrats et les partenaires, jusqu’à l’accompagnement des Personnes Placées Sous- Main de Justice (PPSMJ) est accaparé par l’équipe de direction qui
transmet dorénavant de manière verticale et non négociable ses directives.
Dans ce contexte de gestion formelle des mesures, la fonction du CPIP ne consiste plus à établir une relation positive avec la PPSMJ afin d’évaluer et prévenir une éventuelle récidive mais bien de collecter auprès d’elle, le plus rapidement possible, toutes les informations permettant de rédiger un rapport dans les temps requis. Ce rapport étant présenté par notre hiérarchie comme le seul moyen de « tracer » notre travail, de prévenir le risque disciplinaire et de ne pas entacher la réputation du service.
Les CPIP qui tentent tant bien que mal de répondre à cette exigence de périodicité des rapports s’inquiètent de la mise en cause éventuelle de leur responsabilité en cas de récidive puisqu’ils risquent alors de se voir reprocher d’avoir sacrifié le fond au profit de la forme du suivi.


Les seuls moments où l’équipe est associée au fonctionnement du service, c’est lorsqu’il faut faire reluire la com’ du SPIP. La direction, désormais obnubilée par le « donner à voir » multiplie l’accueil de journalistes et de stagiaires de tous horizons sans se préoccuper de notre capacité à les recevoir
dans de bonnes conditions. Cette priorité « marketing » fixée par le directeur qui recrute certains agents triés sur le volet, jugés capables de représenter le SPIP, laisserait penser que la direction travaille à ses ambitions personnelles plutôt qu’à l’intérêt général.


Ce malaise que nous décrivons a été récemment accentué par l’interpellation devant l’entrée du SPIP d’une PPSMJ. L’équipe de direction a permis à la police d’organiser une « interpellation- guetapens » en instrumentalisant le travail d’un CPIP. Cet évènement qui a fortement perturbé les agents, témoigne du peu de cas que fait notre direction de notre sécurité physique et de notre santé psychique.


Nous rappelons que le décret n°82-453 du 28 mai 1982 relatif à l’hygiène, la sécurité du travail et la prévention médicale dans la Fonction Publique d’Etat et la circulaire du Secrétariat du Ministère de la Justice en date du 2 juin 2014 stipulent que les chefs de service sont chargés de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité.


Nous rappelons également que le Référentiel des Pratiques Opérationnelles (RPO) ainsi que les règles européennes relatives à la probation préconisent notamment que « les services de probation ont pour but de réduire la commission de nouvelles infractions en établissant des relations positives
avec les auteurs d’infraction afin d’assurer le suivi, de les guider et de les assister pour favoriser la réussite de leur insertion sociale. De cette manière, la probation contribue à la sécurité collective et à la bonne administration de la justice ».

Cette atmosphère anxiogène installée en pleine période de pandémie nous fait craindre, comme l’année précédente, un départ massif d’agents lors de la prochaine CAP de mutation.
Dans ce contexte, la prise de risque est maximale avec des retentissements sur la vie personnelle des agents qui se vivent désormais comme de simples instruments susceptibles de servir de fusible lorsque l’institution défaille.

Nous demandons la mise en oeuvre d’un management bienveillant, respectueux des agents et attentif à la prévention des risques psycho-sociaux, nous demandons l’instauration d’un dialogue social constructif ayant pour but de servir l’intérêt général du service, nous demandons à notre hiérarchie de nous associer aux orientations du
service afin de conserver un sens à notre métier.


Nanterre, Le 12 mars 2021
Intersyndicale CGT Insertion Probation – Snepap FSU du SPIP des Hauts de Seine