Monsieur le Président,
A bien des reprises, de CAP en CAP, notre délégation CGT et FSU s’est posée la question
de marquer le coup face au manque de considération, au mépris, voire aux attaques que
vous nous opposez. Cependant, cette fois, notre décision de boycotter cet exercice a fait
consensus d’entrée de jeu, sans la moindre hésitation, tant sur le terrain, la colère et la
déception de nos collègues sont grandes.
Commençons par le contexte global.
Déclaration préliminaire Assistant de service social
Depuis son élection, le président Macron n’a eu de cesse de s’en prendre aux droits
sociaux, d’accroître les inégalités et d’ériger en modèle de société la précarité et la
flexibilité sous couvert de modernité. Les fonctionnaires ne sont pas épargnés par ces
attaques. Pour preuve, le rétablissement du jour de carence, instillant ainsi l’idée que les
fonctionnaires ne sont que des « fainéants », utilisant les arrêts de travail comme des
congés ; le gel du point d’indice également. Prochainement, ce sont nos retraites qui
seront en péril, bientôt le temps de travail. Et puis au passage, pour faire toujours plus
d’économies, on reporte sine die l’application du passage en catégorie « petit »A des
travailleurs sociaux, dont les ASS. Procéder ainsi c’est nier la reconnaissance à « BAC+3 »
des diplômes. A ce rythme, il est certain que si 3 = 2, le déficit des comptes publics va
être vite résorbé ! Dès lors, puisque la promotion d’ASS entrant en formation en 2018
sera, elle, reconnue bac+3, nous nous interrogeons donc sur la capacité que notre
administration nous reconnaît à accueillir des stagiaires dont le niveau de diplôme sera
reconnu comme plus élevé.
A la pénitentiaire, plusieurs collègues ASS sur des fonctions de CPIP vont partir à la
retraite avec un goût amer. Comme vous nous l’avez confirmé en juin, l’administration a
pris des engagements qu’elle ne tient pas, et nos collègues voient leurs retraites amputées
des primes qui devaient pourtant être prises en compte dans le calcul. D’ailleurs, depuis 7
ans, vous ne nous répondez toujours pas concernant le devenir des ASS qui n’ont pas
intégré le corps des CPIP, même si cette trahison de la parole donnée apporte quelques
éléments. Sur le terrain, l’affectation demeure toujours une loterie, fonction de la place
qu’un directeur de SPIP souhaite ou non accorder à l’ASS (sur des missions d’ASS).
Demeure principalement la charge de travail, disproportionnée, et avec des moyens
matériels toujours aussi limités.
A la PJJ, c’est sensiblement la même chose. Certes, un groupe de travail s’est réuni
concernant la doctrine d’emploi des ASS. Mais cela fait plus de 5 ans qu’il aurait du se
réunir et surtout que des décisions auraient dû être prises. On note cependant des écarts
flagrants entre les discours tenus par l’administration lors de ces réunions et les pratiques
sur le terrain. Pour preuve, le respect de la pluridisciplinarité et le nombre de mesures
prises en charge par les ASS La seule « considération » que nous ayons se trouve dans la
norme d’attribution des moyens où un poste d’ASS est considéré comme un demi poste
d’éducateur en termes de mesure sans prendre en compte la spécificité de notre métier.
Pour vous, nous ne sommes qu’une variable d’ajustement comptable, corvéable à merci.
D’ailleurs, nous sommes atterrés d’apprendre l’abandon, dans le projet de loi de finance
2018, des 38 postes annoncés et décidés dans le cadre des plans de lutte contre la
radicalisation terroriste. Vous avez créé des postes d’éducateurs et de psychologues (en
deçà des besoins réels soit dit en passant) décidés dans le même plan, mais les ASS et le
regard pluridisciplinaire qu’ils apportent au sein des équipes ne semblent pas être votre
préoccupation tant que ces personnels pourront être mis a contribution sans restriction.
Au secrétariat général, nos collègues d’outre mer vont enfin percevoir les primes que
certaines attendent depuis maintenant 5 ans. Dommage qu’il ait fallu pour cela que le
tribunal administratif, saisi par l’une d’elles, ait rappelé à l’ordre le ministère de la justice et l’ait, en outre, condamné à verser en plus des dommages et intérêts. Gageons que ceux-ci seront rapidement versés, la décision du TA date tout de même du mois de juin dernier…
Gageons également que la prime de l’année 2015, toujours impayée pour 3 collègues,
ainsi que pour celles qui officiaient à l’époque, sera également prise en charge sans que
l’autorité administrative soit obligée d’intervenir à nouveau. Le ministère de la justice
aurait économisé ces dommages et intérêts s’il avait tenu compte de nos nombreuses
interpellations sur ce sujet depuis plusieurs années. Il est vrai que nous n’avons pas la
force de persuasion d’un TA… Par ailleurs la circulaire des missions, dont le « toilettage »
était promis depuis 2013, a enfin été présentée lors des journées nationales des ASS du
personnel des 13 et 14 novembre 2017. Dommage qu’il ait fallu que les ASS fassent le
forcing pour pouvoir l’amender. Il aurait été si simple de prévoir de les associer en amont
de cette présentation. Un oubli sans doute…
Venons en maintenant à l’application du RIFSEEP pour les corps communs du ministère de
la justice, dont nous faisons partie. Nous rappelons que nos organisations se sont toujours
positionnées contre les modalités de ce régime qui fait la part belle à la notion de mérite
et à l’individualisation des carrières.
La circulaire qui vient d’être publiée démontre que nous avions raison en tout point quant
à son analyse. Aujourd’hui il y aura autant de régime indemnitaire qu’il y aura d’agents et
tant pis pour les mal notés, les casaniers (ceux qui ne muteront pas tous les 3 ans), ou
tout simplement ceux qui sont attachés à leur travail ou leurs missions.
Dans un contexte de gel du point d’indice et de report des mesures statutaire ce régime
indemnitaire injuste apparaît comme la seule possibilité pour les personnels de voir leur
salaire évoluer…mais ce n’est qu’un miroir aux alouettes !
Venons en désormais à l’avancement, l’un des objets de cette CAP. L’exercice 2016 a été
très violent et irrespectueux. Nous avons souhaité discuter avec vous, non pas pour que
vous vous rangiez à nos arguments, nous sommes relativement lucides, mais pour que
vous puissiez entendre notre point de vue et notre argumentation. Entendre, et concevoir
qu’un point de vue différent du votre puisse exister. Engagement avait été pris de nous
rencontrer avant cette CAP. Une proposition a finalement été adressée, 15 jours avant la
CAP, alors que tout était déjà décidé. Nous souhaitions ouvrir le dialogue mais ce rendez-vous de dernière minute est une nouvelle marque de mépris.
Vous allez donc décider, par exemple, lors de cette CAP, qu’un ASS de la PJJ est plus
méritant qu’un ASS du SG et doit être promu et ce, d’autant plus qu’il vit dans le Grand Est tandis que l’autre est en Sud Ouest. Tout ceci a un petit côté surréaliste que notre « petit cerveau » d’ASS bac + 2 pour 3 ans d’études n’arrive pas à comprendre et encore moinsadmettre. Quel talent !
Pour finir, parlons de la méthode. Depuis des années nous vous demandons d’avoir en
notre possession les documents préparatoires à la CAP dans les délais légaux, soit 8 jours
avant la CAP. Encore une fois, ce n’est pas le cas. Nous vous rappelons que notre
engagement syndical dans le cadre d’une CAP pour lequel nous n’avons aucune décharge
demande du temps, de la préparation, et qu’il ne s’agit pas d’un hobby.
Boycotter aujourd’hui est un choix qui nous met également en difficulté et ce n’est pas de
gaîté de cœur que nous le faisons puisque cela implique pour les collègues concernés par
cette CAP un délai d’attente supplémentaire, et pour les élus de revenir prochainement,
désorganisant ainsi notre quotidien professionnel et personnel.
Mais trop c’est trop !
En lieu et place du dialogue social que nous sommes en droit d’attendre, notre
administration nous sert depuis trop longtemps un monologue antisocial et c’est pourquoi
nous prenons aujourd’hui nos responsabilités en ne siégeant pas.
Fait à Paris, le 6 décembre 2017
Les élus de la CGT-FSU la CAP des ASS