Paris, le 16 mai 2023
Monsieur le Président,
Le CSA SPIP se réunit aujourd’hui dans le contexte toujours vivace de contestation du projet gouvernemental de réforme des retraites. La CGT IP le rappelle : l’objectif est le retrait de cette réforme. Les 64 ans, c’est non ! Nous appelons tous les personnels des SPIP à le réaffirmer au gouvernement dans la rue le mardi 6 juin !
Les 3 derniers CSA SPIP ne comportant aucun des points qui font aujourd’hui l’actualité des services, la CGT IP a du une nouvelle fois imposer les sujets à l’ordre du jour.
La DAP a choisi de nous présenter pour avis le projet d’arrêté qui vient donner toujours plus de pouvoirs aux DI sur les situations RH des agents. Si le changement est ici cosmétique, on ne peut que s’alarmer, comme lors de la présentation d’autres textes sur le sujet il y a quelques temps, que la DAP continue de donner des pouvoirs aux DI sans les moyens afférents et sans être en capacité de garantir les agents contre les abus et décisions arbitraires qu’on constate déjà trop souvent. Augmenter les pouvoirs des DI, c’est réduire les droits des agents.
Autre point mis à l’ordre du jour par l’administration : le Plan de Lutte contre les Violences de la DAP. Pourquoi alors que ce plan a été présenté en CTSPIP en octobre 2022 ?
Nous avions fait remonter plusieurs remarques lors des réunions de travail sur ce document, alors qu’il était encore à l’état d’ébauche. Quelle surprise de constater que, d’un coup, le document avait été finalisé et qu’une fois de plus vous êtes restés sourds à nos remarques.
A ne pas écouter les agents, on obtient un mauvais document, qui n’a de plan que le nom. C’est une succession de suppositions, de propos plus ou moins mesurés, d’idées plus ou moins mauvaises, sans aucun engagement concret, sans même un vrai diagnostic, sans budget, sans échéances… Et pour suivre tout ça, pourquoi s’encombrer d’un comité de suivi associant les représentants des personnels ? Un comité de suivi fantoche fera tout aussi bien l’affaire !
La CGT IP dénonce le choix de l’administration pénitentiaire de sortir ce plan hors de toute référence au champ de la santé sécurité au travail (SST). On parle de risque de violence, mais on ne parle pas du Document unique d’évaluation des risques professionnels, document obligatoire dans tous les services, mais encore inexistant dans de trop nombreux SPIP. On parle de prévention mais on ne parle pas des assistant.e.s et conseiller.e.s de prévention, qui devrait être la clé de voûte de la prise en charge des questions liées à la SST et qui se retrouvent une fois encore laissés en marge. On parle de recenser les évènements, mais on ne parle pas des Formations Spécialisées (ex CHSCT), on ne parle pas du Rapport Social Unique (ex Bilan social, que la DAP s’obstine à ne pas produire d’année en année).
Plutôt que de réinventer toute une machinerie, répétons-le avec des garanties de succès plus que mesurées, la CGT IP avait proposé à la DAP de se mobiliser enfin pour permettre aux dispositifs de prévention existants de fonctionner ! Nous n’avons malheureusement pas été entendus.
La CGT IP avait rappelé à la DAP la nécessité d’établir un diagnostic préalable de la situation des SPIP avant d’imaginer plan. Pas entendus encore. La qualité des réponses s’en ressentira forcément !
Aussi, comment mesurer l’indignité d’un plan qui se refuse à voir l’évidence : depuis le début les violences évoquées dans le plan ne concernent que les violences perpétrées par des personnes détenues ou suivies à l’égard des personnels (et un peu aussi à l’égard d’autres personnes détenues). Quid des violences institutionnelles vécues par les publics qui nous sont confiés alors que la France bat chaque mois un nouveau record de surpopulation carcérale ? Les plus de 2000 matelas au sol devraient inciter à la réflexion et à l’action, pas au déni. Le lien de cause à effet entre les violences et les conditions de détention n’est-il pourtant pas évident ?
Enfin, puisqu’on parle des violences subies par les personnels des SPIP, comment ne pas témoigner en tant qu’organisation représentative des dizaines d’appels que nous recevons chaque mois de collègues qui nous font part de leur situation de grande souffrance. Parfois parce qu’elles ont subi des violences verbales ou physiques de personnes suivies. Beaucoup plus souvent parce qu’elles subissent une maltraitance institutionnelle inacceptable, ou parce qu’elles ne trouvent plus aucun sens dans les actes professionnels qu’on exige d’elles. Pour illustration, plus de la moitié des situations traitées par AlloDiscrim concernent l’administration pénitentiaire.
Mais de tout cela, il ne faut pas parler ! Rejouons sans fin la comédie de la vertueuse DAP contre les méchants détenus et en avant toute !
On regrettera quand même que ce soit l’administration qui a laissé couler les groupes de travail sur les risques psycho-sociaux qui nous présente ce plan aujourd’hui, alors que ces derniers avaient été initiés à la demande des organisations représentatives en CTSPIP à l’époque.
Concernant les points dont nous avons demandé l’ajout à l’ordre du jour :
- Validation des procès verbaux des CSA : nous constatons que nous n’avons plus aucun compte-rendu des échanges tenus en instance. Nous vous rappelons que les textes prévoient à chaque début de chaque instance la validation du procès verbal de la précédente. Quel sens a un vote sur une instance vieille de plus de 2 ans ?
- Label Qualité : une première réunion du comité de suivi auto-institué par la DAP et excluant les représentant.e.s élu.e.s des personnels s’est tenue fin avril. Nous vous remercions donc M le président de nous tenir informés de l’avancée de vos projets de privatisation de nos métiers et de nos missions. Merci d’avance !
- Astreintes : actuellement les astreintes réalisées par les DPIP le sont hors de tout cadre réglementaire. Gérées à la petite semaine par les DI, la CGT IP constate des pratiques parfaitement dysfonctionnelles et inégales selon les terrains. La DAP refuse toujours de produire un document national à ce sujet. Flemme ou conscience d’être en dehors des clous ? En même temps, comment s’étonner alors que la justification de la création des astreintes n’ait jamais été clairement explicitée. Les astreintes des agents chargés de la surveillance électronique génèrent également de grandes difficultés qui retombent inexorablement sur les agents. Notre administration s’obstine à alourdir la charge de travail des ASE alors même qu’elle ne parvient pas à recruter suffisamment pour remplacer les départs en retraite. Résultat ? Non-respect des temps de repos, territoires de plusieurs centaines de km couverts, aucune prévention des risques psychosociaux, impossibilité de faire valider ses heures supplémentaires ou de bénéficier des temps de récupération … Mais comme ce n’est jamais assez, s’ajoute depuis quelques mois le grand n’importe quoi des BAR (bracelets anti rapprochement) : tout est urgent, rien ne fonctionne, tout va bien ! La détention à domicile sous surveillance électronique est victime à son tour d’un phénomène de surpopulation carcérale : les ASE payent le prix de mauvaises décisions depuis des années et on frôle désormais une totale rupture du système.
- Fiche de poste des ASS : alors que le RPO2 a été sorti en grandes pompes par la DAP il y a à peine un an, nous avons découvert cette nouvelle fiche de missions des ASS en SPIP, sortie en catimini et qui sur certains points dit l’inverse de ce que dit le RPO2. D’ailleurs annule-t-elle celle du RPO2 ? La remplace-t-elle ou alors doit-on tirer à pile ou face pour savoir laquelle est valable ? La CGT IP le rappelle : la vision qu’a la DAP de la pluridisciplinarité est dépassée, celle qu’elle a des ASS est réductrice. La complémentarité des compétences doit enrichir la pratique de chacun et non pas retirer des missions des 4000 CPIP pour les confier à 200 ASS ! Cantonner un.e ASS à un rôle de guichet d’accès au droit est une vision étriquée de ce métier. La CGT IP ne l’accepte pas, ni dans le RPO2 ni dans cette nouvelle mouture de fiche de poste.
Monsieur le président, vous le voyez, il y a bien des choses à dire sur les sujets que vous n’avez pas pensé à mettre à l’ordre du jour de nos échanges. Heureusement, la CGT IP est là pour qu’on ne meure pas d’ennui en CSA SPIP.