http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2020/03/mail-GDS-.pdf
Message de Madame Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice
Mesdames, Messieurs,
Face à l’accélération de la propagation du virus Covid 19, le Premier ministre a annoncé hier soir le renforcement des mesures pour éviter le contact entre les personnes, qui est le principal facteur de diffusion du virus. Les fermetures que ces mesures impliquent ne doivent pas impacter les services essentiels à la vie de nos concitoyens qui doivent rester ouverts.
Le service public de la justice est évidemment essentiel à la vie de nos concitoyens. Les services d’urgences pénales et civiles des juridictions, l’incarcération dans des conditions dignes des détenus ou encore l’accueil des mineurs confiés à la protection judiciaire de la jeunesse et les missions essentielles de l’administration centrale doivent pouvoir être maintenus dans un cadre qui prévient la propagation du virus tant à l’égard des personnels que des publics reçus ou pris en charge par les personnels relevant du ministère de la justice.
Depuis plusieurs semaines, des plans de continuation d’activité sont préparés à chaque niveau afin de permettre la continuité de la justice. Ces plans prévoient les mesures dont la mise en œuvre permet de réduire l’activité des services tout en assurant le traitement des urgences que nous devons à nos concitoyens.
Dès le lundi 16 mars 2020, les plans de continuation d’activité seront actionnés dans l’ensemble des juridictions pour éviter la propagation du virus. Les juridictions seront donc fermées sauf en ce qui concerne le traitement des contentieux essentiels :
– Les audiences correctionnelles pour les mesures de détention provisoire et de contrôle judiciaire ;
– Les audiences de comparution immédiate ;
– Les présentations devant le juge d’instruction et le juge des libertés et de la détention ;
– Les audiences du juge de l’application des peines pour la gestion des urgences ;
– Les audiences du tribunal pour enfants et du juge pour enfant pour la gestion des urgences, notamment pour l’assistance éducative ;
– Les permanences du parquet ;
– Les référés devant le tribunal judiciaire visant l’urgence, et les mesures urgentes relevant du juge aux affaires familiales (notamment immeubles menaçant ruine, éviction conjoint violent) ;
– Les audiences auprès d’un juge des libertés et de la détention civil (hospitalisation sous contrainte, rétention des étrangers) ;
– Les permanences au tribunal pour enfants, l’assistance éducative d’urgence ;
– Les audiences de la chambre de l’instruction pour la détention ;
– Les audiences de la chambre des appels correctionnels et de la chambre d’applications des peines pour la gestion des urgences.
Il convient, dans la mesure du possible, d’annuler les sessions d’assises compte tenu des risques de contagion pour les jurés et le public. Les procès pourront être renvoyés, dans les limites du délai raisonnable et dans le respect des délais de détention provisoire.
Les services d’accueil du public seront donc fermés ainsi que les maisons de justice et du droit et les points d’accès au droit. Les agents de ces services ne recevront plus de public. Ils pourront, en revanche, continuer à être joint par téléphone pour répondre aux situations d’urgence.
En dehors des contentieux essentiels, les audiences seront reportées. Des dispositions devront être prises pour assurer l’information des justiciables et des avocats sur ces reports (affichage, site internet ou message téléphonique).
Les équipes destinées à mettre en œuvre le traitement des contentieux essentiels ne devront pas comprendre les personnes vulnérables au virus et les personnels qui n’ont pas de solutions de garde pour leurs enfants de moins de 16 ans. Une simple attestation sur l’honneur sera suffisante pour ne pas les faire participer à ces équipes.
Les magistrats et agents de greffe qui ne participeront pas à ces équipes devront, dans la mesure du possible, poursuivre leur activité en télétravail. Les personnels pour lesquels une telle activité est impossible seront placés en autorisation spéciale d’absence.
Des mesures devront également être prises pour éviter la circulation du virus en détention.
Sur la base des instructions adressées aux juridictions, les transferts administratifs entre établissements de métropole et d’Outre-mer et les extractions judiciaires seront limités au strict minimum.
Au sein même des établissements, les mouvements internes doivent être fortement réduits, en suspendant les activités en milieu confiné (enseignement, activités socio-culturelles, sport). En revanche, les promenades et activités sportives en plein air ou en espace non confiné seront maintenus avec les aménagements nécessaires. Il en ira de même pour le travail et la formation professionnelle dans les espaces permettant de respecter les mesures barrière.
Quant aux parloirs, des mesures restrictives sont introduites (à raison du nombre, de l’âge ou de la vulnérabilité des détenus ou proches concernés). Les accueils famille seront fermés jusqu’à nouvel ordre dès lors que la configuration des lieux l’exige.
Dans les SPIP, les entretiens individuels, visites à domicile et prises en charge collectives sont suspendus. Conformément aux instructions adressées aux juridictions, l’installation des mesures de surveillance électronique à domicile a vocation à être différée. Les éventuelles interventions des agents feront l’objet de mesure de précaution renforcées.
L’activité dans les services de placement de la protection judiciaire de la jeunesse sera évidemment maintenue. Après évaluation des situations validée par le directeur territorial, des demandes de mainlevée pourront être présentées aux magistrats compétents.
Avec l’autorisation du magistrat, des mineurs placés en CEF pourront être accueillis dans d’autres types de structure. Les contrôles judiciaires et SME devront être adaptés en conséquence. En revanche, en raison de la dimension privative de liberté qu’implique le placement en CEF, ces structures ne pourront accueillir des mineurs soumis à d’autres types de mesure.
Les activités collectives à l’extérieur des établissements sont suspendues. Pour celles organisées à l’intérieur des établissements, les consignes sanitaires (nombre restreint de jeunes, distances de sécurité), doivent être respectées.
En fonction des situations locales, il appartient aux responsables des CER de décider en lien avec les juridictions du maintien ou de la suspension des sessions non encore débutées.
Les contacts entre les professionnels de la PJJ, les lieux d’accueil et les familles d’accueil devront, dans la mesure du possible, être maintenus par téléphone. Le maintien en placement au sein d’une famille d’accueil doit se faire avec son accord exprès. Une vigilance particulière sera apportée aux personnes fragiles présentes dans l’environnement familial. Le cas échéant, une réorientation d’un mineur malade sera organisée vers un autre dispositif.
L’activité des services de milieu ouvert est suspendue à l’exception des missions suivantes :
– Accueil téléphonique au service et permanence physique d’un ou deux agents pour faire face aux nécessités ;
– Mission attachée aux tribunaux qui devra être disponible pour les présentations de mineurs au tribunal, les audiences qui seraient maintenues et les urgences de milieu ouvert ;
– Intervention dans les quartiers mineurs.
Les directeurs de service doivent transmettre aux magistrats la liste des mineurs dépendant de leur cabinet avec mention des situations pour lesquelles un contact téléphonique sera maintenu en raison de la gravité de la situation (violences intrafamiliales, risques suicidaires…).
Les professionnels des services de milieu ouvert qui n’ont pas de problème de garde d’enfants et qui ne sont pas vulnérables pourront être appelés pour assurer une rotation des personnels afin de garantir le maintien des missions essentielles (MEAT, placement et détention).
L’activité est maintenue dans les EPM et les QM avec réduction des activités socio-culturelles afin d’assurer le respect des mesures sanitaires.
De manière générale, l’ensemble des réunions doit être reporté, dès qu’elles suscitent un déplacement sauf à utiliser un dispositif de visioconférence. Je vous rappelle également la nécessité de faire respecter l’ensemble des mesures barrières.
La cellule de crise du ministère va être étoffée pour nous permettre de répondre à l’ensemble des questions que vous vous posez. […]
Je sais pouvoir compter sur votre investissement et votre implication pour que nous puissions traverser cette crise sans précédent dans la période contemporaine. Je peux vous assurer de mon soutien et de celui de l’ensemble des personnels du ministère pour adapter les instructions à l’évolution de la situation et vous apporter les réponses aux questions légitimes que vous pouvez être amenés à vous poser.