Compte rendu du CT SPIP du 9 juin 2015

Cliquer ici pour télécharger et imprimer le communiqué CT SPIP

Déclaration liminaire unitaire pour l’abandon immédiat de la préaffectation

Nous renvoyons à la déclaration liminaire intersyndicale sur le sujet de la pré-affectation, ainsi qu’au communiqué commun à toutes les organisations syndicales à la suite du CT-SPIP.(communiqué_unitaire_preaff_sortiectspip _)

En résumé, la DAP souhaite signer un protocole d’accord sur ce sujet, et faire une « étude de faisabilité » sur ce qu’implique l’abandon de la pré-affectation des stagiaires CPIP. Il est à peu près clair pour la CGT que cela signifie une petite mobilité du corps en 2016, mais clair aussi que nous préférons cette option au maintien d’un système dévastateur pour les services et la formation des agents. En revanche, nous serons très attentifs à ce que contient ce protocole, et il ne sera pas question pour nous d’y inclure quantité d’autres sujets que la DAP voudrait y voir figurer. Nous ne sommes pas dupes non plus, et nous veillerons à ce que cet accord ne soit pas une façon de faire « porter le chapeau » aux organisations syndicales. C’est la DAP qui est responsable de l’état de fait, c’est elle seule qui sera responsable de ses conséquences !

1 – Projet d’arrêté modifiant la liste et la localisation des emplois de DFSPIP 

 

Ce projet est présenté suite à un recours d’une organisation syndicale devant le tribunal administratif, qui dénonçait certaines nominations à des emplois fonctionnels. Il n’était donc soumis au vote du CT que parce qu’il fallait modifier l’arrêté afin de procéder de nouveau aux nominations.

La CGT s’est abstenue sur ce vote.

2 – Projet de circulaire relative au fonctionnement du CNE (Centre National d’évaluation)

 

Presque 30 pages détaillant le fonctionnement d’une espèce de « monstre » administratif : une double hiérarchie SPIP/établissement ; un DPIP possiblement adjoint ou chef de service, mais détaché du SPIP du ressort ; des évaluateurs / notateurs qui ne sont ni du même corps ni de la même filière ni de la même résidence administrative ; des missions très floues où se recoupent « évaluation de la personnalité » et « évaluation de la dangerosité » ; un établissement pénitentiaire qui est un « concept » – car un seul CNE mais 3 antennes… Et une circulaire qui tente de normaliser tout ça alors que c’est impossible ! Les débats ont été – très – longs, et il a fallu amender le document page par page. La CGT s’est concentrée sur les missions du « pôle insertion et probation », et sur les affectations des CPIP en son sein.

Concernant les missions du CPIP, le projet de texte présentait : « à l’aide du dossier et d’entretiens, il évalue la situation de la personne en identifiant ses risques, ses besoins d’intervention et ses facteurs de protection. » Où l’on retrouve le gloubiboulga criminologique en vogue et dénué de sens… Evaluation du risque de quoi ? Intervention sous quelle forme ? (Surtout au CNE où la prise en charge est inexistante…) A qui parlent ces mots : « facteurs de protection » et que veulent-ils dire ? Il n’a pas été aisé d’avoir des réponses claires, et pour la CGT elles ne le sont toujours pas. Aussi avons-nous voulu corriger le texte, et préciser les compétences du SPIP comme suit : « le pôle insertion et probation évalue la situation de la personne en participant à l’identification des risques de commission de nouvelles infractions qu’elle présente, en mettant en évidence ses besoins d’intervention socio-éducative ainsi que ses facteurs de protection. A cet effet, il procède à une évaluation sociale, familiale et matérielle de la personne. » Cet amendement a été retenu.

Concernant les affectations des CPIP, la CGT ne voulait pas du maintien des postes à profil dans la mesure où ce type de recrutement est la porte ouverte à l’arbitraire et l’opacité d’une telle sélection. Un CPIP est un CPIP universel, qui fait le même métier où qu’il se trouve – mais dans des conditions différentes. Nous souhaitions donc que les trois antennes du CNE deviennent des résidences administratives à part entières, avec des postes proposés en C.A.P. et une mobilité « classique. » Si les débats ont pu mettre fin au profilage, les CPIP du CNE seront à l’avenir intégrés à l’antenne milieu fermé du SPIP du ressort, faisant passer le choix du niveau de l’administration centrale au niveau du DFSPIP et de la mobilité interne à son service. Est-ce une avancée ? Pour la CGT, la réponse est non ! Une chose n’est pas garantie : que le choix du chef de service se fasse sur la base du volontariat ; une autre chose, en revanche, est garantie : que le CNE soit TOUJOURS privilégié au détriment du reste de l’antenne !

Malgré les modifications que nous avons apportées à ce projet de circulaire, la CGT a voté contre ce texte. En effet la CGT a toujours dénoncé ce type de « vitrine pénitentiaire ». Le CNE reste un lieu au sein duquel la dangerosité –concept juridique contestable voire inexistant- et sa prétendue évaluation sont une réponse toujours plus sécuritaire à une commande politique.

 

3 – Projet de décret portant diverses modifications relatives aux comptes nominatifs 

 

Ce projet de décret prévoit différentes dispositions : qu’un pécule « parties civiles » (PPC) non réclamé soit reversé au Fond de Garantie au-delà du seuil de 500 € ; qu’un prévenu ou un condamné puisse opérer, de façon prévisionnelle, des versements volontaires sur son PPC en attendant le jugement sur les intérêts civils ; et également qu’un sortant de prison sous aménagement de peine mais sans levée d’écrou – pour les SL, les PE et les PSE – puisse obtenir, sur autorisation du chef d’établissement, de l’argent sur son « pécule libérable » et pas uniquement sur son « pécule disponible. »

Ces dispositions vont globalement dans le bon sens pour la CGT. Il s’agit en grande partie de dispositions de mise en œuvre de la réforme pénale (Loi du 15 août 2014).

Nous avons cependant soulevé deux points : un détenu qui verse de l’argent sur son PPC en prévision de sa condamnation sur intérêts civils ne pourra récupérer cette somme s’il n’a finalement aucune condamnation qu’au moment de sa libération. Nous avons voulu savoir en vertu de quoi, et s’il s’agissait d’un problème technique ou d’un problème de droit. A quoi l’administration nous a répondu que ce n’était pas possible en droit, le PPC étant destiné aux parties civiles « et autres créances ». Ainsi cette somme ne peut lui être restituée faute de savoir si effectivement il n’avait aucune autre créance en cours – pension alimentaire, trop-perçu CAF, loyers impayés, etc.

L’autre point concernait l’autorisation du chef d’établissement pour accéder au pécule libérable en cas de sortie sous aménagement de peine. Nous souhaitions laisser cette possibilité de faire la demande au régisseur des comptes nominatifs à la seule appréciation du SPIP, sachant que celle-ci revêtira un caractère d’urgence dans l’immense majorité des cas de figures. Mais on n’enlève pas aussi facilement le contrôle du chef d’établissement au sein de l’administration pénitentiaire ! Cette modification du texte a donc été rejetée.

Ce texte n’était pas soumis au vote.

 

4 – Présentation des nouveaux référentiels intégrés dans la démarche de labellisation :

 

Attention, c’est du lourd ! Présentés comme ça, en termes « d’audits » et de « démarches qualité » et de « processus de labellisation » et autres concepts techno-novlangue-capitalistes, nous aurions pu prendre ces référentiels à la légère – mais non ! Sous couvert d’harmonisation des pratiques et de « service rendu », ces référentiels créent du droit et des obligations nouvelles pour les travailleurs sociaux travaillant en établissements !

La M3P (Missions des Pratiques Professionnelles Pénitentiaires), qui pilote ce projet, a présenté trois « référentiels qualité » portant sur les prises en charge au QD, au QI et pour les personnes détenues sortantes. Si les deux premiers auraient mérité des précisions – notamment sur les qualifications de « potentiel de dangerosité et de vulnérabilité » –, c’est surtout le dernier qui concerne le SPIP en de nombreuses parties. En effet, celui-ci « s’engage à mener un entretien auprès des personnes détenues, avant qu’elles ne soient libérables » ; il reçoit en entretien « chaque personne détenue, devenue condamnée définitive », mais également à l’occasion d’un transfert, pour lequel il « réalise un rapport de liaison comprenant les éléments permettant l’appréciation du parcours de détention », « prend contact avec les intervenants extérieurs du dossier aux fins de continuité des mesures », et « fait le lien avec le SPIP du lieu d’affectation » ; toutes choses dont il aura connaissance car « la CPU examine la situation de tous les sortants », etc., etc. Quand on connaît la réalité des conditions de travail en établissement, et notamment en maison d’arrêt, il y a de quoi s’inquiéter !

C’est donc ce que n’ont pas manqué de faire les organisations syndicales, mais celles-ci ont vite été taxées de manquer d’ambition (sic !), d’être pour le moins-disant (re-sic !) : les échanges ont été pour le moins secs et vifs de la part de la présidente. Car, malgré ses déclarations et même si elle estime ne pas avoir de « compte à [nous] rendre », il est utile de rappeler que c’est NOUS qui travaillons, et NOUS qui devons faire toujours plus à moyens constants ! Alors, même s’il a été précisé plusieurs fois que ces textes n’avaient pas une portée générale ni une valeur normative, qu’ils constituaient une phase de test et d’expérimentation, les processus de labellisation sont connus : il faut des croix dans les bonnes cases, sous peine de ne pas être labellisé…

Nous appelons donc les agents à dire haut et fort ce qu’ils ne peuvent pas faire ! Et nous renvoyons tous les collègues au seul texte qui doit cadrer les interventions du SPIP : le code de procédure pénale ! Ces référentiels sont déjà testés dans plus d’une trentaine d’établissements pénitentiaires, et la CGT estime qu’en matière « d’expérimentation » le panel est déjà bien large… L’administration s’est pour sa part engagée à faire un point d’étape « à l’automne. »

Dernière chose : ces documents n’ont pu être soumis à un quelconque vote ni amendés, car… ils avaient déjà été diffusés… la semaine précédant le CT-SPIP !

5 – Point d’actualité groupe de travail SPIP :

 

Ce comité technique avait lieu une semaine après l’envoi par la CGT de sa contribution écrite. Nous avons donc voulu savoir quelle avait été sa réception par la DAP, et avons souligné un problème général de méthode : cela fait plusieurs mois que la CGT a pris le parti de discuter avec elle, qu’elle a participé à de nombreuses réunions avec la direction de projet SPIP, qu’elle a fait valoir ses points de vues et arguments ; pour autant, nous ne savons toujours pas ce que l’administration en pense, ce qu’elle retient, ce qu’elle écarte, bref, ce qu’elle compte faite de nos observations ! Nous sommes toujours avec les mêmes documents, et il n’est plus possible pour nous de tourner ainsi « à vide » : l’AP doit vite se positionner, en fonction de quoi la CGT prendra également son parti et ses responsabilités.

Il nous a alors été répondu que, lors de la réunion du 26 juin prochain à propos du Manuel de mise en œuvre de la contrainte pénale, la DAP nous indiquerait quels sont ses choix pour parvenir à une « synthèse » de tous les avis exprimés. La CGT sera donc très attentive à ce qui lui sera exposé lors de cette rencontre, et ne manquera pas de communiquer sur ses suites.

Nous avons tout de même appris au passage que la présidente, bien loin visiblement des recommandations des R.E.P., jugeait le travail social en SPIP « trop clivant », et cherchait notre identité propre. S’il est si certain, comme le croit la DAP, que le RBR recueille un large consensus, notre « identité » serait d’évidence à chercher au Canada…

Le prochain CT-SPIP est prévu le 16 septembre 2015. L’abandon de la pré-affectation devra alors devenir une réalité, le Manuel de mise en œuvre de la CP fera l’objet d’un vote lors de cette séance.
Si la CGT a pu démontrer qu’elle était force de proposition, elle saura également rappeler qu’elle peut être une force de résistance !

 

 

Montreuil, le 23 juin 2015