Reçue ce lundi 4 mars en audience bilatérale par le directeur de l’agence nationale du TIG, la CGT insertion Probation s’est faite le porte-voix des inquiétudes des terrains sur la création de postes de délégués territoriaux du TIG annoncés dans les SPIP. Le but de cette audience était pour la CGT Insertion Probation de chercher des réponses aux questionnements déjà soulevés sur les conséquences de la mise en œuvre de l’agence du TIG.
La plateforme numérique : seul outil intéressant
A l’occasion de cette rencontre, la plate-forme numérique, outil introduit par l’agence du TIG nous a été présenté. Force est de constater que cet outil a été pensé pour les professionnels et sera une plus-value pour répertorier les structures d’accueil. Il s’agit d’un outil uniquement opérationnel, accessible aux CPIP en charge des mesures, aux structures, aux magistrats et avocats (qui auront une visibilité uniquement de l’offre de structures de TIG) et aux personnes exécutant les TIG. Cet outil a été élaboré en interne en s’appuyant sur un groupe de professionnels. Il s’agit donc d’une avancée.
Communiqué sur l’agence du TIG version PDF ici
Alors que la CGT s’inquiétait au vu de la lubie de l’administration de recourir aux outils actuariels, de l’insertion d’algorithmes pour les placements TIG ; il n’en est rien. Le jugement clinique des professionnels ne sera donc pas substitué par la machine.
Pour le reste, rien n’est respecté !
La création de cette agence sous la forme juridique d’un service à compétence nationale avait été présentée en CT SPIP en octobre. Cependant, rien dans les documents présentés à l’époque ne faisait référence à la volonté de l’Administration de créer ces postes de délégués. Rien ne laissait donc présager que ces postes de Délégués Territoriaux seraient confiés à des CPIP et ponctionnés sur les renforts indispensables attendus dans les services.
Pour la CGT Insertion probation, cette confiscation de renforts pour les services est non seulement inentendable, mais surtout totalement injustifiée et en contradiction totale avec les préconisations contenues dans les travaux liés à l’agence du TIG ainsi qu’avec les missions et décrets statutaires de chacun (CPIP et DPIP).
Une procédure qui ne respecte pas les textes :
- Absence de l’étude d’impact : La circulaire du 9 avril 2013 encadrant la création de « services à compétence nationale » impose que la création de ces structures s’accompagne d’une étude d’impact évaluant notamment l’ensemble des conséquences qu’engendre sa création. Cette étude devait donc prévoir l’existence de délégués territoriaux, déterminer les catégories de personnels auxquels cette nouvelle fonction serait confiée et l’impact de
leur création sur les services où ils sont affectés. La CGT insertion probation a donc demandé à en être destinataire. En vain puisqu’elle n’existe pas…
- A la place, le rapport « PARIS/LAYANI » relatif au TIG publié en mars 2018, seul document pouvant s’y apparenter : ce rapport semble être la bible de la DAP puisque dans le cadre de la mise en place de l’agence du TIG, toutes les préconisations de ce rapport ont été respectées et mises en œuvre. Toutes exceptée une : celle de confier les postes de délégués territoriaux du TIG aux DPIP !
En effet il est clairement indiqué dans ce rapport que « l’agence du TIG devra à terme bénéficier d’un délégué par service. Que ces délégués auront une mission spécifiquement dédiée au TIG et devront pouvoir s’appuyer sur les CPIP. Qu’ils peuvent être désignés parmi les cadres en poste. Qu’enfin la création ne pourra s’affranchir de la question des charges de travail des CPIP notamment, qui demanderait à être diminuée de moitié ».
Pourquoi des CPIP et non des DPIP au regard des missions statutaires de chacun?
Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous avons questionné le directeur de agence sur ce qui justifiait le choix de la DAP d’attribuer finalement cette fonction de délégué territorial du TIG à des CPIP et non aux cadres comme cela a été pensé, avec pour conséquence de découvrir encore des services : aucune réponse.
La CGT ne l’explique que par l’opportunité d’alimenter rapidement ces postes de délégués.
L’administration semble s’être contentée de regarder si le nouveau décret statutaire des CPIP était un obstacle à les positionner comme délégués territoriaux. Selon leur appréciation et leurs termes, le décret statutaire ne s’y oppose pas. Sauf qu’il aurait été judicieux que l’Administration examine aussi le décret statutaire des DPIP puisqu’en son article 1, il prévoit :
« Ils
exercent des fonctions d’encadrement, de conception, d’expertise, […]
Ils pilotent le travail des équipes pluridisciplinaires placées
sous leur autorité […] Aux fins d’inscrire l’action du service
dans les politiques publiques d’insertion, de probation et de
sécurité, ils développent des coopérations avec les autres
services publics, les institutions et le secteur associatif ».
La DAP a visiblement omis de consulter les fiches de poste qu’elle publie pour la CAP de mobilité des DPIP puisque dans l’ensemble des fiches de postes de DPIP sur des antennes mixtes ou en milieu ouvert apparaît un item : « consolider et développer le réseau partenarial » sous forme d’obligation puisqu’il est indiqué que le DPIP devra « consolider et développer les lieux d’exécution de peine de TIG ».
Tout est donc déjà prévu dans les missions des DPIP quand au contraire,
rien n’est prévu dans les missions des CPIP.
Un positionnement administratif bancal
Ce constat se retrouve par ailleurs dans le positionnement administratif des agents.
En dehors des CPIP placés (dont la Résidence Administrative est en DI et non sur une antenne), il n’existe pas de CPIP à compétence départementale, encore moins bi- départementale.
Or, les postes de délégué territorial ont pourtant cette dimension qui entre en contradiction avec l’affectation des CPIP sur une RA précise déterminant leur sphère géographique d’exercice et de compétence.
Nous rappelons encore une fois que :
- Les temps de déplacements professionnels hors RA sont du temps de travail et peuvent donner lieu à des délais de route.
- L’intervention hors RA est encadrée : qu’elle ne peut être supérieure à 40% du temps de travail effectif, que cela est subordonné au volontariat de l’agent et que celui-ci doit être porteur d’un ordre de mission.
Chez les DPIP, au contraire, la dimension départementale existe déjà par la possibilité d’une affectation au siège, mais également sur l’aspect des missions énumérées dans leurs fiches de postes.
Un recrutement à la va vite et à l’emporte-pièce dans le refus manifeste de toute règle du dialogue social
Dans son aditif à la CAP, l‘Administration a publié des postes « classiques » qu’elle va transformer discrétionnairement et illégalement, sans passer par la CAP après avoir déjà évincé le CT SPIP (pas de présentation de fiche de poste comme le prévoient les compétences du CT SPIP) , en dénaturant les fonctions des CPIP et en passant outre les textes quant au rattachement des CPIP sur une résidence administrative.
Le recrutement qui sera opéré au niveau local nourrit les plus grandes inquiétudes : quels critères seront retenus ? qu’en sera-t-il si aucun volontaire ne candidate ?
Mais les inquiétudes sont encore plus grandes pour ceux qui se porteraient volontaires car rien ne nous est présenté en terme de :
- Lien hiérarchique : quel niveau hiérarchique pour ce délégué pouvant intervenir sur plusieurs départements ?
- De moyens pour exécuter cette nouvelle mission : est ce que les SPIP vont être amputés d’un véhicule réservé alors que le parc automobile est déjà désastreux, et que nos DFSPIP confondent véhicules de service et véhicule de fonction ?
- De suivi des publics : le délégué n’aura pas vocation à exercer sa mission d’accompagnement, contribuant ainsi à générer une charge de travail supplémentaire avec un poste en moins pour le service.
- De valorisation du tissu partenarial déjà travaillé : la mission d’entretien du réseau partenarial, dans laquelle les CPIP sont très impliqués, peut se voir confisquer par une seule personne au détriment de la connaissance et de la qualité acquises au long cours par les collègues en place
La commande politique, aussi incompréhensible et inaboutie qu’elle soit, n’a donc pas de limite, pas même celle des textes en vigueur, tant sur la création de l’agence, que ceux tenant au statut des uns et des autres, et bien évidemment, de ceux du dialogue social.
Un constat déjà dénoncé par les sénateurs
Ce constat, n’est pas fait uniquement par notre organisation comme le démontre ces quelques lignes du rapport du sénat dans les débats sur l’adoption de loi de finance 2019 au sujet des CPIP et du projet de création d’une agence TIG :
« Il semble déraisonnable d’accroître leurs missions avant même que les recrutements prévus soient effectifs. Les personnels dénoncent des « innovations » cosmétiques, inutiles et qui ne s’appuient pas sur leurs besoins. Ainsi, le plan pénitentiaire insiste sur le renforcement des moyens alloués au travail d’intérêt général, avec la création d’une agence des travaux d’intérêt général. Annoncée sans état des lieux ni consultation des personnels qui mettent en œuvre chaque jour des peines de travail d’intérêt général, cette réforme a symbolisé pour beaucoup le mépris du Gouvernement à leur égard».
Nous invitons donc évidemment les collègues qui ambitionnent de muter sur les postes proposés de faire leur demande. Peu importe les critères qui seront retenus au niveau local, rien ne les obligera, à se positionner sur ces postes. En l’absence d’organigrammes de référence, l’administration serait bien en peine de flécher des postes… Par contre, nous attirons leur vigilance sur leurs futures conditions d’exercice dont nous ne savons rien.
Pour toutes ces raisons, la CGT Insertion Probation dénonce le projet de création des délégués territoriaux au TIG voulu par l’administration.
Nous rappelons que la création de postes proposés à la CAP doit permettre aux services de faire face aux charges travail immenses !
Montreuil, le 6 Mars 2019