http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2020/09/sept-20-audiences-DAP-et-GDS.pdf
La CGT IP a été reçue en audience de rentrée par le DAP et les sous directeurs le 26/08 puis par le Garde des sceaux et son cabinet le 31/08. Nous avons ainsi abordé la place des SPIP, le respect du public et des missions statuaires et légales, la gestion RH et la réforme statutaire de la filière insertion probation.
*Audience DAP
La DAP a reçu notre organisation après une longue période sans échanges. Nous avons d’emblée rappelé notre représentativité et insisté sur l’état moral des agents en SPIP qui est au plus bas : absence de reconnaissance, dévoiement des missions, gestion RH calamiteuse… Les équipes sont lessivées et l’arrivée de la LPJ dans la plus parfaite impréparation contribuent à une absence de lisibilité du rôle des SPIP au sein de la chaine pénale et judiciaire.
- Volet RH : droits des agents, mobilité, avancement
La CGT a réinsisté sur le niveau d’incompétence générale des directions interrégionales sur le plan RH et demande un plan d’accompagnement d’urgence de ces services. Notre organisation doit intervenir très régulièrement pour bon nombre de situations dans lesquelles les textes réglementaires sont inappliqués, soit par pure méconnaissance, soit parce qu’en DI l’usage prévaut sur la loi ! C’est inadmissible.
Nous demandons notamment qu’une information claire et précise soit faite à tout agent.e sollicitant une disponibilité ou un détachement, notamment sur les droits au retour. Les exemples encore récents démontrent, s’il était nécessaire, que l’administration ne remplit pas son rôle en matière d’information, voire donne des informations erronées.
Nous sommes revenus sur le traitement des agents quant à l’octroi de la prime Covid et des nouveaux critères discriminants pour les personnels en SPIP. La prise en compte diminuée des jours de télétravail – critère apparu pendant l’été – est liée pour la DAP au fait que le télétravail n’a pas entrainé de surcroit d’activité. Par ailleurs, l’administration centrale a demandé aux DI de procéder à une notification individuelle, ce qui n’est pas respecté.
Nous avons clairement demandé la position de la DAP sur la possibilité de télétravailler puisque le texte sera présenté au prochain CTM. Le flou reste total… En effet, si la compatibilité du télétravail avec une partie des missions du SPIP semble acquise, les moyens matériels et l’accès sécurisé à APPI semble être des freins pour l’heure indépassables.
La DAP a voulu revenir sur le traitement de la mobilité des CPIP en 2020 mais un bilan doit s’opérer à l’automne avec les représentants des personnels. Grâce à la lutte des agents et au relais des élus CGT, la mobilité des CPIP a pu conserver un système de barème. Les services RH et le DAP lui-même proposent de maintenir cet entre-deux, ce qui fera l’objet d’une concertation et si la situation 2020 ne met pas les agents à l’abri de certaines dispositions, cette proposition reste une avancée certaine pour la lisibilité du droit des agents à un traitement équitable. Au final, la DAP se dit peu convaincue par cette réforme mais cherche encore la marge de manœuvre qui serait la sienne.
Par ailleurs, le sous-effectif endémique persiste et la DAP assure que si le schéma d’emploi de la fin de l’année le permet, il y aura un nouveau plan de recrutement de contractuels. Cette solution reste imparfaite pour notre organisation qui milite pour le recrutement de titulaires et pour l’intégration des contractuels via le recrutement sur titre. Cette dernière solution permettrait en outre de les former en un an et donc de renforcer plus rapidement les terrains.
En outre, nous avons mis en avant le fait qu’à l’instar de 2019, la DAP a fait disparaitre cette année les recrutements des personnels RQTH se privant ainsi d’une voie de renfort supplémentaire.
Enfin, nous sommes revenus sur le taux dit de « pro/pro » (promus/promouvables), taux indigent qui n’assurera plus un pyramidage correct du corps des CPIP. La CGT – seule organisation qui porte cette thématique depuis plus de 2 ans – a engagé un recours et une demande de révision auprès du nouveau ministre. La DAP nous indique avoir eu connaissance de ce recours et avoir introduit la même démarche.
=> A la CGT, nous constatons que les droits des agents sont de plus en plus malmenés au sein de l’administration et du Ministère. Mais nous sommes aussi convaincus que seule la lutte paye, et à l’image de la mobilisation contre les LDG, nous continuerons d’y consacrer toutes nos forces pour ne pas perdre ces droits.
- LPJ, missions et place des SPIP
Cette audience a été l’occasion de dresser un bilan de mi-mandat et de constater une fois encore l’absence totale de travail entre les représentants des personnels et les services de la sous-direction Insertion Probation (SDIP). Pire, cette situation s’étend également au niveau de l’ENAP qui fait fi de notre représentativité et élude les propositions qui nous été faites de retravailler sur le socle de formation suite à la réforme statutaire.
La conclusion du CT SPIP de juillet 2020 a été la réplique exacte de celle de juillet 2019 : on va nous contacter pour travailler les sujets de fond ensemble… Pourtant le constat est imparable : au mieux, la DAP annonce travailler ses dossiers (organigrammes de référence, ajustement de la cartographie des SPIP via la modification de l’art.A44…), au pire, elle conduit ses travaux dans le dos des représentants pour les mettre au pied du mur (guide de l’évaluation, modification des trames APPI, trames ESR…).
Face à la rengaine – qui serait presque offensante si elle n’était aussi grotesque – uniquement portée par la DAP sur la « montée en compétence » et « le gain en crédibilité » des SPIP, la CGT ne voit qu’une entreprise de fossoyeurs qui, faute d’arriver à endiguer le sous-effectif, cherche par tout moyen à institutionnaliser le suivi différencié sur le dos des personnels comme du public !
Pour la CGT, la DAP doit très rapidement se repositionner et déterminer avec nous sa vision du service public pénitentiaire : nos missions ne cessent d’être grignotées par une externalisation dangereuse (agence du TIG, renforcement du secteur associatif via la LPJ) et l’autonomie de nos service est sans cesse remise en cause comme le démontrent le choix de confier les décisions des permissions au chefs d’établissement plutôt qu’aux DFSPIP et en refusant d’afficher clairement qui pourra diriger les futures SAS !
L’exemple des ESR reste typique de cette tentative de détournement des missions et de nos interlocuteurs puisqu’on nous explique que le secteur associatif serait l’équivalent d’une autorité mandante !
=> Dans tous les cas, la CGT a annoncé la rupture de confiance envers cette sous-direction – et plus largement la DAP – qui devient une entreprise pour dévoyer définitivement les missions des SPIP – et notamment celle des CPIP. La CGT IP n’aura de cesse de revenir sur le socle réglementaire et statutaire qui encadre notre intervention, sur le secret professionnel parfaitement défini et sur l’éthique professionnelle qui anime les personnels !
Rencontre avec le Garde des sceaux et son cabinet social
La CGT a été reçue par le Ministre de la Justice, Éric DUPOND-MORETTI, place Vendôme. Cette rencontre était une prise de contact depuis la nomination du Garde des Sceaux début juillet. Cette audience était l’occasion de rappeler les revendications portées par les organisations CGT du Ministère et de faire un état des lieux des difficultés que rencontrent les personnels dans l’exercice de leurs missions.
La CGT IP, avant d’aborder l’ensemble des sujets, a tenu à apporter, devant le Garde des Sceaux, tout son soutien aux collègues du SPIP de Nantes. N’en déplaise aux médias ou politiques avides de trouver un bouc émissaire, nous avons tenu à rappeler l’investissement, le professionnalisme incontestable des agents et les charges de travail inacceptables auxquelles ils font face. Nous avons invité le Ministère à exprimer lui aussi son soutien à ses agents et les protéger du populisme qui semble une fois de plus émerger. Le Garde des Sceaux nous a indiqué en retour que la saisine de l’IGJ avait pour but non de trouver un responsable de quelque défaillance que ce soit, mais bien de permettre de faire le constat d’une prise en charge adaptée de l’auteur par le SPIP.
- Vers la reprise d’un dialogue social ?
La CGT a tenu à exprimer les difficultés rencontrées dans l’exercice du dialogue social au sein du Ministère de la Justice et plus particulièrement au sein de l’Administration Pénitentiaire. Bien que la CGT soit l’organisation majoritaire des personnels des SPIP et qu’elle reste aussi ouverte que possible au dialogue, qu’elle demeure force de propositions, nous ne pouvons que constater que les DFSPIP, DI, l’ENAP ou les responsables des départements métiers de la DAP refusent d’associer les représentants CGT et ainsi les personnels aux décisions impactant leurs pratiques professionnelles comme leurs droits. Cela quand ce n’est pas de discrimination envers notre organisation dont qu’il est question.
Le Ministre indique pour sa part que sa porte sera toujours ouverte, que tous les sujets ont été consignés et seront traités. Ses conseillers nous ont par la suite rappelé leur disponibilité pour échanger avec la CGT IP et travailler autour des revendications que nous ne cesserons de porter.
- Évolution indemnitaire et plan de requalification des personnels administratifs
La CGT a souhaité insister sur le fait que les personnels administratifs et techniques de tout le Ministère ne devaient pas être les laissés pour compte.
La CGT IP milite pour un plan de requalification des personnels administratifs de l’AP qui restent les grands oubliés alors qu’ils sont un rouage fondamental des SPIP et plus largement de tous les services de la DAP. Ce plan doit non seulement permettre de reconnaître la valeur professionnelle et l’investissement des personnels administratifs qui ne peut se traduire que par une évolution indemnitaire significative, mais aussi en leur permettant d’être promus sur place quand ils occupent des fonctions relevant du corps des SA (pour les Adjoints) ou des Attachés (pour les Secrétaires).
- Création du corps des psychologues
La CGT porte de longue date la création d’un corps de psychologues au sein du Ministère.
Cette création comporte 3 axes : la constitution ab initio d’un corps de fonctionnaires titulaires de leurs postes – l’intégration des psychologues qui restent pour l’heure agents non titulaires – la constitution d’une carrière linéaire (plutôt qu’un emploi fonctionnel).
La précédente ministre nous assurait il y a tout juste un an que la résolution était imminente ! La conseillère sociale du garde des Sceaux reconnaît que cette création de corps, en tardant à être promulguée, a pâti de la mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction publique qui vise davantage à recruter des agents non titulaires qu’à créer des corps de fonctionnaires.
Pour autant, le cabinet du Garde des Sceaux nous confirme sa volonté de promouvoir un réel statut pour les psychologues dans les meilleurs délais. Une réunion interministérielle doit définitivement acter la création du statut de psychologue au sein du Ministère de la Justice
- Surpopulation pénale et place des SPIP
La CGT est revenue sur les conséquences de la crise Covid en ce qui concerne la surpopulation carcérale. Le seul effet positif de cette crise aura été de réduire cette surpopulation. Si certains syndicats s’offusquaient à l’époque de cette diminution de la population carcérale, la CGT l’encourageait. Il ne faudrait toutefois pas que les mesures spécifiques ayant cessé, le nombre d’incarcérations connaisse à nouveau une hausse incontrôlée tant la plupart des Maisons d’Arrêt demeurent en surpopulation avec pour conséquences des conditions indignes de détention.
Le Garde des Sceaux semble partager ce constat et se dit enclin à mener une politique visant à limiter les recours à la détention, notamment pour ce qui concerne la détention provisoire. Si l’on peut regretter que l’ARSE soit la principale mesure envisagée, le constat de la méconnaissance des magistrats sur les alternatives à l’incarcération semble partagé.
- Organigrammes de référence au sein des SPIP
Comme lors de chaque audience, la question des organigrammes de référence au sein des SPIP a été soulevée. La CGT a exhorté le Ministère et la DAP à avancer, en concertation avec les organisations représentatives des personnels, sur leur élaboration afin de mettre enfin les moyens RH en adéquation avec leurs charges de travail. Si le Garde des Sceaux et ses conseillers affirment que le travail est amorcé, nous leur avons rappelé que nous attendions d’y être associé, la dernière réunion de travail ayant eu lieu en juillet 2019… Nous exigeons que les représentants des personnels soient associés à ces travaux et qu’un calendrier soit défini pour parvenir à une réelle échéance et définition de ces organigrammes comme à la refonte de l’article A44 du CPP qui fixe les SPIP, sièges et antennes des services.
- Réforme statutaire des CPIP et reconnaissances de missions statutaires
La CGT a formé, auprès du Ministère dans un premier temps, un recours administratif pour contester le taux dit de « pro/pro ». Publié en juin, l’arrêté ministériel fixe ce taux à 9 %.
La CGT estime que pour le corps soit constitué de façon comparable à ce qui préexistait à la réforme, ce taux devrait être porté à 25 %. Cela permettrait d’alimenter de façon significative le grade de classe exceptionnelle alors que le taux actuel ne permettrait l’accès à ce grade qu’à 600 CPIP environ sur 2019/2021. L’enjeu est fondamental pour le corps des CPIP, et les engagements pris en 2016 et 2017 doivent être honorés. Le garde des Sceaux et sa conseillère indiquent avoir engagé une procédure de renégociation du taux de promotion suite au recours formalisé par notre organisation.
Une réunion d’arbitrage doit être programmée à Matignon courant septembre pour tenter de réévaluer le taux à la hausse. Si la révision du taux n’est pas acquise, le fait que, sous l’impulsion de la CGT IP, le Ministère tente de réparer cette injustice est un signal positif envoyé aux agents.
La CGT IP a tenu à alerter le Garde des Sceaux sur les orientations de la DAP quant à la prise en charge des personnes confiées aux SPIP et ainsi des pratiques professionnelles de ses personnels. Nous avons rappelé que l’insertion des personnes, à travers le travail social, était un socle fondamental pour prévenir la récidive et que le calcul du seul risque ne permettait en aucun cas d’y concourir. Nous avons ainsi dénoncé la dérive qui met à mal la place de l’accompagnement socio-éducatif pourtant essentiel à nos métiers et à la prévention de la récidive car il contribue à une connaissance fine de nos publics, au profit d’une prépondérance donnée à l’évaluation. Si cette notion a toujours fait partie de nos prises en charge, la méthodologie d’évaluation chronophage et trop orientée sur le risque statistique défendue actuellement par la DAP contribue très largement à nous éloigner de la mission d’accompagnement.
Le Garde des Sceaux, comme son conseiller pénitentiaire, semblent reconnaître que cet équilibre entre accompagnement socio-éducatif, évaluation des situations sociale, familiale et matérielle et évaluation du risque de réitération de faits délictueux doit être rétabli. Au-delà de ce discours qui peut apparaître positif, nous attendons aujourd’hui que de réelles orientations en ce sens se dégagent. Contrairement à ce que pensent la DAP et l’ENAP, les professionnels n’attendent pas de grilles ou de trames leur imposant un rythme et des modalités de suivi pour donner du sens à leurs interventions et prises en charges.
La CGT IP a encore dénoncé auprès du Garde des Sceaux la mise en œuvre de la LPJ au sein des SPIP. D’une part, les agents n’ont aucunement été accompagnés ou informés des changements induits par la LPJ si ce n’est par l’imposition de trames destinées aux enquêtes sociales rapides (ESR). D’autre part, nous avons pointé l’absence de défense du service public face à l’associatif alors même que la LPJ devait replacer les SPIP dans le présentenciel. Des conventions fixant la répartition entre SPIP et associatif ont été conclues sans que les agents en soient informés, sans que les DFSPIP ne s’en saisissent véritablement et sans que les moyens RH alloués ne permettent que les SPIP trouvent toute leur place dans le présentenciel. Nous avons ainsi une nouvelle fois dénoncé la répartition des 1500 emplois prévus dans le cadre de la place donnée aux SPIP par la LPJ et avons rappelé l’urgence à renforcer les services en personnels (administratifs, CPIP, Agents PSE) et à cesser de doter en priorité les agences du TIG, du renseignement pénitentiaire ou les DISP.
En revenant à la charge sur le taux qui va régir l’avancement ces prochaines années, la CGT IP défend la réforme statutaire pour laquelle elle s’est battue avec les personnels de la filière Insertion Probation.
Ces audiences de rentrée ont permis de conforter notre organisation dans ses combats pour les droits des agents : recrutements, mobilité, avancement… autant de thématiques sur lesquelles les représentants de la CGT IP sont restés force de proposition au plus près de besoins des personnels.
De la même manière, la CGT ne cessera de se mobiliser et de se battre pour parvenir à l’aboutissement de la réforme statutaire des CPIP par un taux de promotion conforme aux engagements pris en 2017 , pour obtenir un plan de requalification des personnels administratifs, le passage en catégorie B des agents PSE et la création d’un statut de psychologue.
Toutefois, le maintien des missions, de l’accompagnement socio-éducatif, reste une lutte fondamentale pour garder le sens de notre intervention, consolidée par la réforme statutaire qui n’a aucunement modifié notre rôle. Si le Ministère et la DAP ne veillent pas aux missions et intérêts de ses personnels, la CGT IP, elle, ne cessera d’y être attentive et se montrera combative pour les préserver.
Montreuil, le 1er septembre 2020