La CGT IP a été reçue le vendredi 30 avril par la Conseillère Dialogue Social et le Conseiller Pénitentiaire du ministre de la Justice. Cette demande d’audience, sollicitée pour notre organisation, faisait suite à une rencontre avec le Ministre en janvier dernier. Il s’agit de réengager des discussions sur le métier de CPIP. Notre constat est qu’il existe une distorsion entre les consignes de notre administration et les textes législatifs et réglementaires encadrant l’activité des CPIP.
http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2021/05/mai-21-audiences-Ministere.pdf
- Rééquilibrer les missions du SPIP
La DAP n’a de cesse de mettre à mal le cœur de notre intervention, à savoir l’accompagnement socio-éducatif des personnes placées sous-main de justice, en détention comme en milieu ouvert au profit du seul prisme d’une probation psycho-criminologique. Nous avons rappelé que malgré plusieurs évolutions législatives récentes, l’accompagnement socio-éducatif et la nécessité du travail sur l’insertion des personnes placées sous-main de justice sont systématiquement replacées au cœur des missions du SPIP et du métier des CPIP par les législateurs. En outre, le Conseil Economique, Social et Environnemental s’était penché sur cette question à la demande du 1er Ministre et a rendu un rapport peu reluisant sur cette question en 2019 (http://www.cgtspip.org/rapport-du-cese-sur-la-reinsertion-2019/). Il constatait un désinvestissement de notre administration quant à la mission de réinsertion des personnes détenues et comportait plusieurs préconisations qui sont restées lettre morte. Or chacun constate que d’année en année, les moyens de la réinsertion des détenus, de l’accès au droit, de la formation professionnelle, de l’accès aux soins restent très en deçà des besoins réels, en milieu fermé comme en milieu ouvert. Incapable d’assurer les moyens d’une vraie politique d’insertion des publics qui lui sont confiés, l’administration, par le biais de la sous-direction Insertion Probation et sa déclinaison en DPIPPR dans les Directions Interrégionales, abandonne petit à petit toute ambition dans ce domaine au profit d’un discours centré sur la prévention du risque de récidive et les programmes afférents. Respire, Aderes, Respect, Parcours, PPR ou Adapt sont devenus l’alpha et l’oméga de la réflexion sur les moyens d’intervention des SPIP. Les groupes peuvent s’avérer un outil complémentaire utile mais lorsque leur développement se fait au prix de l’abandon d’un travail visant à offrir des solutions adaptées en termes d’insertion sociale et professionnelle de nos publics, au prix de l’abandon du travail partenarial sur les terrains, de l’orientation vers les dispositifs de droit les plus élémentaires, c’est tout un pan de notre métier qui est en péril. Pire, l’Enap se fait le relais de cette orientation et de plus en plus de nouveaux collègues sont formés en pensant que l’accès au droit et l’insertion des personnes suivies ne sont pas le travail des CPIP ! En excluant de facto le contexte socio-économique des usagers de l’administration pénitentiaire, ce courant s’inscrit dans le mouvement capitaliste qui fait de l’individu le seul responsable de sa condition ! Comme si on pouvait espérer sérieusement favoriser la désistance de personnes exclues de fait de la société, sans qu’on puisse leur offrir un espoir de retour ! Or la CGT IP n’a de cesse de le répéter : nos missions n’ont pas changé depuis la circulaire de 2008 et l’accompagnement socio-éducatif n’en a pas disparu ! Chacune des lois votées depuis 2009 concernant les SPIP a rappelé l’importance d’avoir des actions spécifiques pour assurer l’insertion des personnes détenues ou suivies en milieu ouvert et le rôle central des SPIP dans ce domaine.
- Réviser la formation initiale
Ce ne sont pas les quelques 100 assistant.es de service social présent.es dans les SPIP qui pourront assurer un chantier d’une telle ampleur et la CGT IP revendique l’arrêt de ce détricotage des missions : on ne peut pas séparer l’intervention du CPIP du champ de l’accès aux droits ni revendiquer le recrutement d’ASS excluent de toute prise en charge. Si la formation initiale des CPIP s’est peu à peu éloignée de cette réalité, c’est que l’administration et l’ENAP ont fait le choix de favoriser une vision idéologique plutôt que de former les CPIP aux missions prévues par les textes. La CGT IP a donc pu porter la revendication que les organisations représentatives des personnels des SPIP associés à l’élaboration du contenu de la formation initiale des personnels d’insertion et de probation à l’Enap. Il faut savoir que jusqu’à présent, l’Enap fonctionne en circuit totalement fermé et que les programmes de formation ne font l’objet d’une discussion qu’au sein du conseil d’établissement, avec donc uniquement les élus des personnels travaillant à l’Enap ! Les conseillers du Ministre nous ont confirmé que cette demande sera satisfaite.
- Redonner sa place à l’insertion
Au vu de l’état de déliquescence de la question de l’insertion des personnes suivies, et sur la base notamment du rapport du CESE (http://www.cgtspip.org/rapport-du-cese-sur-la-reinsertion-2019/), nous avons également demandé la mise en place d’urgence de groupes de travail à ce sujet au sein de la DAP. Ces groupes devront passer par un état des lieux de l’existant et un bilan des trop rares initiatives qui ont été prises ces derniers mois, le plus souvent avec plus de souci d’affichage que de réelle efficacité. La CGT IP portera les sujets relatifs à la mise en œuvre des protocoles pourtant prévus (cartes d’identité, droit des étrangers, Pôle Emploi) mais qui ne fonctionnent pas. Nous porterons également tous les sujets qui posent réellement difficulté dans les SPIP aujourd’hui : l’absences de solutions d’hébergement pour les publics les plus précaires, les difficultés pour l’accès aux soins, l’accès à la formation professionnelle et à l’IAE, le manque de postes de TIG et de places en placement extérieur, les questions liées aux vieillissement et à la dépendance d’une partie de la population pénale etc. . De vrais sujets pour de vrais services spécialisés dans l’insertion et la probation !
- Revalorisations et représentativité
Cette audience a également été l’occasion pour la CGT IP de rappeler que la profession reste dans l’attente de réponses concernant l’augmentation de l’IFPIP de l’ensemble des CPIP à compter du 1er janvier 2021. Nous avons également pu relancer nos demandes de garanties sur la pérennité d’instances de dialogue social propres aux personnels d’insertion et de probation (CAP dédiées) et sur le taux de CPIP pouvant accéder à la classe exceptionnelle ces prochaines années, combat mené par notre seule organisation depuis 2 ans. Sur ces 3 points, le dialogue qu’entretient la CGT IP avec le ministère porte ses fruits puisque les demandes portées par le ministère rejoignent les propositions de notre organisation et devraient être suivies d’effet.
Ambitieuse pour les droits des personnels, la CGT IP ne lâchera rien pour défendre également les vrais besoins des publics pris en charge et la défense de nos métiers !